« Les femmes sont complémentaires des hommes »
Aujourd’hui ce sont exclusivement des hommes qui décident des doctrines et des lois de l’Église. Ils décident même entre eux de la vocation des femmes. Ils réduisent les femmes à la femme et à ses spécificité physiologiques, les pensent comme essentiellement relatives aux hommes (épouse, vierge) et aux enfants (mère, vierge), et leur enjoignent spécifiquement de cultiver les vertus d’accueil, de sacrifice et de douceur, ce qui est bien pratique pour eux. De leur vocation masculine ils ne parlent pas puisqu’ils l’identifient tout simplement à la vocation humaine. Ces hommes apprécieraient-ils qu’une papesse discoure doctement, sans leur demander leur avis, sur leur « vocation naturelle » d’époux, de vierge et de père ? Apprécieraient-ils que des femmes évêques les déclarent « complémentaires » des femmes afin de les exclure de certaines responsabilités dans l’Église ?
Jusqu’à présent les femmes ont été plus souvent les objets de la doctrine de l’Église que ses sujets. Il est temps qu’au paternalisme succède le partenariat et que cesse enfin la guerre faite aux femmes.
« Elles veulent faire comme les hommes »
Beaucoup d’entre elles ne veulent même plus devenir prêtres tant cette fonction leur parait bâtie sur la domination : elles préfèrent susciter d’autres ministères. D’autres femmes souhaitent simplement avoir place aux côtés des hommes. Aucune ne revendique de prendre la place des hommes, c’est-à-dire de dominer à son tour les personnes de l’autre sexe. Elles espèrent un renouvellement profond des ministères en supprimant l’exclusion des personnes de l’autre sexe : un vrai partenariat qui conduirait à une réduction de la hiérarchie entre clercs (aujourd’hui exclusivement des hommes) et laïcs (aujourd’hui très majoritairement des femmes), à un service qui ne soit plus un « pouvoir sacré » masculin et à une prédication qui valorise les femmes réelles plutôt que d’exalter « la femme ».
« La société civile n’a pas à nous dicter notre conduite »
La sacralisation du pouvoir des hommes dans l’Église est un frein au partage des responsabilités dans le monde professionnel et dans la famille. Cela regarde tout le monde.
Et cela devrait regarder les chrétiens : leur témoignage est faible quand les ministères évangéliques sont les instruments de domination d’une catégorie de baptisés sur une autre.
« L’Église est liée par la Tradition »
Il y eut des diaconesses dans les premiers siècles. Paul lui-même évoque notamment : « Phœbé, notre sœur, diacre (diakonos) de l’Église de Kenchrées […], protectrice pour bien des gens et pour moi-même » (Romains, 16, 1-2).
Quant à l’exclusion des femmes du presbytérat, les arguments des théologiens médiévaux sont tellement mêlés de mépris à l’encontre des femmes qu’on hésite à parler de « tradition ». Jusqu’au XXe s. il était admis que les femmes devaient être en tout subordonnées aux hommes en raison de leur prétendues imperfection et infériorité. Jean-Paul II, bien qu’opposé à l’ordination de femmes, a réfuté cette opinion par sa lecture de la Genèse et des Lettres de Paul, déclarant : que la domination de l’homme sur la femme est un péché, contraire au plan divin de communion des personnes ; que la soumission doit être « réciproque » entre les époux. Il a donc défait le principal argument des misogynes siècles passés.
« Le magistère ne pourra pas revenir sur sa décision : Jean-Paul II a engagé son infaillibilité »
Le pape a certes engagé fermement son autorité mais pas selon la forme qui caractérise une déclaration « infaillible ». Le texte qui prétend cette infaillibilité est de bien moindre autorité puisqu’il émane de la Congrégation pour la doctrine de la foi qui a interprété après coup que la décision était infaillible. Et, contrairement à l’usage pour une telle déclaration, l’ensemble des évêques n’a pas été consulté.
« A la Cène, c’est à des hommes que Jésus dit : “Faites ceci en mémoire de moi” »
Supposons qu’il n’y ait eu que des hommes à la Cène. Le Christ a institué l’Eucharistie par deux commandements : « Prenez et mangez » et « Faites ceci en mémoire de moi ». « Prenez et mangez » ne s’adressait donc qu’aux hommes et il faut interdire aux femmes de communier.
« Les Douze étaient des hommes »
Oui, mais ils étaient surtout douze juifs, or nos prêtres sont plus que douze et peu d’entre eux sont juifs. C’est pourtant cette réalité là qui est signifiée par Jésus. Il est le Messie venu accomplir la promesse faite par Dieu de rassembler tout Israël à la fin des temps. Des douze tribus d’Israël, nommées d’après les douze fils de Jacob, il ne restait alors plus grand-chose.
Jésus choisit donc, pour renouveler son peuple, douze nouveaux fils de Jacob qu’il envoie en mission en Israël. Les premières communautés comprirent que cette nouvelle Alliance rassemblait non seulement les douze tribus mais l’humanité toute entière, qu’elle concernait les nations païennes et aussi plus directement les femmes en n’exigeant plus la circoncision mais le baptême : « Oui vous avez été baptisés en Christ, vous avez revêtu Christ. Il n’y a plus ni Juif ni Grec ; il n’y a plus ni esclave ni homme libre ; il n’y a plus l’homme et la femme ; car tous, vous n’êtes qu’un en Jésus Christ. » (Galates 3, 27-28)
« Les apôtres étaient des hommes »
Marie-Madeleine est appelée « apôtre des apôtres » par des Pères de l’Église car c’est elle qui annonça la résurrection aux Douze. C’est par ce même témoignage du Christ ressuscité que Paul est apôtre, sans être non plus du groupe des Douze. Et Paul lui-même donne ce titre d’apôtre à une femme nommée Junie (Romains 16, 7).
« Jésus est un homme et l’Eucharistie doit être célébrée par quelqu’un qui lui ressemble »
Comment justifier alors qu’un prêtre africain ou chinois puisse célébrer ?
D’ailleurs cette obligation d’une ressemblance physique oublie qu’on a affaire ici, de manière vivante, au Christ ressuscité que les disciples d’Emmaüs reconnaissent non à son apparence mais à la fraction du pain.
Et pourquoi faudrait-il ressembler physiquement à Jésus pour célébrer le salut qu’il apporte ? Le Christ nous sauve par sa sainteté, non par sa barbe. Un homme peut validement présider l’Eucharistie sans être ni saint, ni vertueux, alors pourquoi pas une femme ?
« Je ne veux pas être prêtre »
Moi non plus. Mais il ne s’agit pas de toi ou moi, il s’agit de ce qui est juste, de ce qui rend témoignage à Jésus.
« Il faut respecter l’image du Christ époux de l’Église »
Ce n’est qu’une image : une des manières de parler du mystère de notre salut. Si l’on veut en faire un absolu, excluons les hommes de l’assemblée car ils ne sont pas à l’image de l’Église épouse. D’autre part, dans le sacrement de mariage les époux homme et femme sont tous deux ministres au nom du Christ et cela ne les empêche pas d’être ainsi le signe des noces du Christ et de l’Église.
« Ste Thérèse de Lisieux désirait être prêtre mais comprit que sa vocation était l’amour »
Oui, c’est d’ailleurs la vocation de tout chrétien reçue au baptême. Sainte Thérèse ne dit pas que c’est la vocation des femmes. Il n’y a pas d’un côté l’amour pour les femmes et de l’autre le pouvoir pour les hommes. Thérèse comprend que l’amour est la vocation chrétienne fondamentale à la source de toutes les autres et c’est pourquoi elle arrive à dépasser son désir d’être prêtre en suivant l’exemple de François d’Assise (un homme) qui, par humilité, refusa les honneurs malheureusement attachés à ce ministère.
« Elles veulent prendre le pouvoir »
Et alors ? Et pourquoi certains clercs accusent-t-ils les femmes de rechercher les ministères comme un pouvoir, alors qu’elles ne demandent qu’à remplir des tâches qu’ils appellent service lorsque ce sont eux qui les exercent ?
« Mais alors vous êtes féministe ! »
« Être féministe c’est seulement revendiquer ses droits d’être humain » Marie-Thérèse van Lunen Chenu, cofondatrice de Femmes et Hommes en Église
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