La presse s’est fait l’écho de l’ouverture du pape François à la question de l’ordination de femmes diacres, mais les analyses des journalistes montrent bien l’ambiguïté de la position du pape François. D’une part il souhaite une meilleure prise en compte des femmes dans la vie de l’Église et dans son gouvernement, d’autre part il reste lié à une image de La Femme dont le rôle symbolique serait totalement différent de celui de l’homme masculin. L‘association FHEDLES a déjà dénoncé cet enfermement des femmes dans leur appartenance sexuelle : vierge ou mère. Dans sa volonté de réforme, le pape François a déjà fort à faire et il se heurte à des oppositions fortes qu’il tente de contourner. S’il ajoute la question des femmes, avec toute la charge émotionnelle que cela comporte, il ne s’en sortira pas. De plus, ni sa culture, ni sa formation religieuse ne lui ont fait apparaître cette question comme prioritaire. C’est déjà très heureux qu’il se montre ouvert et attentif, mais n’attendons pas de réalisation concrète rapide. Cela fait plus de 50 ans que les arguments bibliques, psychologiques, sociologiques et historiques ont été abordés et on sait que rien ne s’oppose au diaconat des femmes. Les Églises protestantes ont pris acte de ces avancées. Mais on a vu que dès que les femmes accèdent à ce premier palier, les autres cèdent les uns après les autres : prêtrise, épiscopat. La hiérarchie masculine de l’Église catholique, est-elle prête à renoncer à sa position dominante?
Aujourd’hui FHEDLES s’interroge sur le bien-fondé de cette demande de diaconat. C’est à une modification en profondeur du ministère qu’il nous faut aboutir. Si dans son désir d’approfondir la question du ministère, le pape François est prêt à aborder une décléricalisation et une désacralisation de celui-ci, alors les femmes y trouveront leur place. La présence des femmes peut contribuer à cette nouvelle forme de ministère, mais elle peut aussi renforcer le cléricalisme et la sacralité, car ces deux composantes si peu évangéliques du ministère ne sont pas réservées aux clercs. Nous connaissons tous des laïcs, hommes ou femmes plus cléricaux que des prêtres. C’est donc la question de l’ordination des hommes ou des femmes qui est ainsi posée. L’ordination doit-elle être un préalable à l’administration des sacrements ou bien doit-elle être le résultat de la conduite responsable d’une communauté chrétienne qui reconnaît en une femme ou un homme le leader dont elle a besoin ?
Alice Gombault pour FHEDLES 13 mai 2016
En complément, le billet de Marie-Thérèse van Lunen Chenu:
Le diaconat, question de femme ou bien question d’Église ?
Le pape François envisage la création d’une commission d’étude sur la possibilité d’accès des femmes au diaconat, annonce sympathique et de bonne volonté certes ; la mesure nouvelle pourrait aider des femmes à prendre courage et à se manifester capables sur le terrain, reconnues responsables et novatrices dans des responsabilités parfois encore précieuses aux yeux de certains mais trop souvent rendues inertes, inaptes et ineptes dans leur sacralisation du passé… Ainsi, si elle est suivie de faits, la nouvelle modeste étape pourrait marquer un pas important aux yeux du commun des fidèles et des infidèles. On n’en voudra donc pas à ce pape courageux qui n’a probablement pas pris conscience du poids du dogmatisme institutionnel dont il a hérité et du retard difficile à surmonter dans ce qu’il ne faut plus appeler « la question des femmes » mais bien, désormais, une question d’Église devenue crûment apparente et prioritaire, une question symptomatique qui retient l’attention et de plus en plus souvent suscite le scandale .
Le problème principal n’est-il pas le manque de capacité de l’Église officielle à se reconnaître ouvertement aujourd’hui patriarcale et mono sexiste, liée, telle un serpent qui se mord la queue, par ses propres interprétations patriarcales et mono sexistes alors que celles-ci sont reconnues de plus en plus largement contraires aux références éthiques et aux normes juridiques actuelles ? Ainsi le problème de fond est bien celui du refus de l’autocritique institutionnelle, du manque de discernement et de l’abus de pouvoir, se soldant aujourd’hui par l’incapacité cléricale à se reconnaître sexiste!
Une queue d’hirondelle n’annonce que de bien loin l’arrivée du printemps… Notre désir de sens, à nous les fidèles et les infidèles de ce temps ne peut guère se contenter de tels écarts et de tels délais : nombreuses et nombreux, nous avons quitté – ou bien chaque jour nous sommes tentés de quitter – le navire de l’institution, recherchant et retrouvant les ancrages du christianisme autrement. Là des hirondelles peuvent déjà nous aider à entendre pour aujourd’hui l’appel de l’évangile.